Pourquoi j'ai suivi mon chef aveuglément ?

Une fois n’est pas coutume, je voulais aujourd’hui vous faire part d’une expérience personnellement vécue parce qu’elle illustre bien la notion de leadership.

 

   1992 : ce n’est pas ma date de naissance et je le déplore, mais la date de mon entrée dans la vie active. Après deux années passées dans une PME comme technico-commercial, des résultats insuffisants et une fusion de l’entreprise avec le géant européen du secteur ont mis fin à cette première expérience.

 

   Me voilà à nouveau en quête d’un travail avec son cortège de CV, de lettres de motivation, d’épluchage d’annonces dans les journaux (oui, j’ai connu l’époque que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître où l’on trouvait les offres d’emploi sur une espèce de cahier en papier que l’on appelait journal), d’entretiens d’embauche.

 

   « Quartier de La Défense, tour vitrée étincelante… « C’est sûr que si je décroche le job, ce serait pas mal » m’étais-je dit alors en me rendant à un entretien d’embauche. A 22 ans, on est parfois très attiré par les apparences et tout ce qui brille… 

 

   Après quelques minutes d’attente dans le hall d’accueil, un petit monsieur (par sa taille) presque aussi jeune que moi me reçoit. D’entrée de jeu, le discours  n’est pas très engageant : « Nous sommes le leader français des peintures anti-corrosion exclusivement  pour les ouvrages d’art. Notre part de marché est de 60%, donc nous sommes la cible privilégiée de nos concurrents. De plus, le marché français perd en volume et en valeur entre 5 et 10% par an car on construit de moins en moins de charpentes ou de ponts métalliques. Notre grande époque était celle de Gustave Eiffel et elle est loin derrière nous. »

 

   « Ouah ! Je vais vous laisser tout de suite » me suis-je dit intérieurement. Mais, nécessité fait loi, je suis resté sagement à l’écouter encore. Il a poursuivi : « Parlons maintenant de notre projet d’entreprise : il est très simple, nous visons une croissance de 5% par an de notre chiffre d’affaires. Facile, puisque nous avons encore près de 40% de parts de marché à conquérir. Ensuite, nous souhaitons gagner tous les appels d’offres concernant les chantiers emblématiques : la Tour Eiffel, le pont Alexandre III, le dôme du CNIT, le viaduc de Garabit, etc. Nous avons  les savoir-faire, les partenaires et les produits pour cela. Ils sont pour nous ! »

 

   « Ouah ! Ce type est fou ! » me disais-je encore. Mais nécessité …

 

   « Pour réussir ce projet, vous vous doutez que nos exigences envers nos collaborateurs sont  très fortes. Vous postulez pour un poste de chargé d’affaires, sachez qu’il va falloir vous battre chaque jour. Vous devrez convaincre les donneurs d’ordre, faire du lobbying pour influencer les appels d’offre. Vous devrez aussi faire adhérer les entreprises d’application de peintures à nos solutions, et même nous faire référencer dans celles qui ne sont pas encore clientes. Ce sera un combat de tous les jours, et nous le gagnerons ensemble ! Ce ne sera pas facile, mais quand vous parlerez à vos amis de votre travail, vous serez fier de ce que vous aurez accompli. »

 

   « Je signe où ? » me suis-je dit. Il m’a proposé le poste et j’ai signé.

   La réalité fut conforme aux promesses : beaucoup d’exigences, beaucoup de travail, beaucoup de réussites et de reconnaissance. Cinq très belles années.

 

   Vingt-quatre ans après, quel est mon regard sur cette expérience professionnelle ?

 

   Mon manager de l’époque est resté pour moi un exemple que je sais aujourd’hui analyser :

 

Exigence : il y en avait beaucoup, sur le comportement, la tenue, l’engagement, le travail et les résultats. Mais combien la réussite est plus valorisante quand elle se fait conformément à l’exigence ! « On l’a fait, mais on l’a bien fait. Très bien, même ! »

 

Valorisation : notre manager savait prendre du temps pour nous écouter sur des sujets positifs. Que ce soit sur un effort, un progrès ou un résultat, il portait toujours un regard sincère, valorisant et empathique.

 

Passion pour le métier : quand il parlait du métier ou des clients, on ressentait toujours que le sujet le passionnait et qu’il était prêt à se battre pour gagner les marchés et faire gagner les clients. Il pouvait parler pendant des heures d’un client, d’un chantier ou d’un produit, avec toujours cette petite lumière dans le regard.

 

Projet : il me l’avait annoncé dès les premières minutes de mon entretien d’embauche. Un projet clair, ambitieux mais réalisable. Tel le capitaine du bateau avec son sextant à la main, il savait, même quand la mer était très agitée, où il était et où il voulait aller : « Cette année, je veux que nous remportions les marchés de la raffinerie de Dunkerque, le nuage metallo-textile de l’Arche de la Défense et la charpente du stade de France. On ne laisse pas ces chantiers aux concurrents ! »

 

   Le plus incroyable, c’est que pour mes collègues et moi, tout semblait facile. Nous étions portés et nous en venions à chercher les challenges qui semblaient impossibles aux autres. Nous en avions envie.

   Pendant cinq ans, je n’ai pas compté mes heures, jamais regardé ma montre, ni les kilomètres qui s’accumulaient au compteur de ma voiture. Quand j’étais grippé, je pensais à la journée qui m’attendait et je n’aurais pas aimé quelle se fasse sans moi. Quand je finissais un rendez-vous en fin d’après-midi, je trouvais toujours le temps de repasser au bureau pour échanger avec lui sur la journée passée et pour préparer celle du lendemain.

 

    Mais toutes les choses ont une fin. Ce manager est reparti dans sa province rémoise pour reprendre une entreprise locale. Il a été remplacé par un autre manager … moins valorisant, moins exigeant, avec moins de projets et de passion pour le métier. Je suis parti quelques mois après, comme d’autres.

 

   Il me reste aujourd’hui le souvenir de cinq très belles années avec un manager exemplaire. Je pense souvent à lui, à ce qu’il aurait fait dans telle ou telle situation. Il m’a beaucoup enrichi, beaucoup fait grandir.

 

   À travers cette expérience, j’ai compris qu’il n’y a pas de performance durable sans management.

 

Et vous, qu’en pensez-vous ?

 

Bonnes réflexions

    Former des managers et des vendeurs ? Pourquoi pas ? On peut former à mieux voir, à mieux comprendre ce qui se passe :

-dans une journée : ça dépote/ça traîne   

-entre deux personnes : elles s’évitent/elles collaborent

-avec un collaborateur : bizarre …il (ne) sourit (pas)/ génial, il a retrouvé la banane,

-dans une situation particulière : l’équipe a beaucoup bossé …et pourtant, on a échoué/ l’équipe s’est bien investie, et les résultats sont là !

-avec un client : top, il passe une deuxième commande/ inquiétant, je n’arrive plus à le joindre…

    Et grâce à la maîtrise d’une grille de lecture qui permet de bien voir, de bien comprendre, de bien décoder, la formation peut aussi aider à identifier quelle est la situation à construire, avec cette équipe, ce collaborateur, ce prospect, ce client. À très court, à moyen ou long terme.

    Oui, la formation peut aider le vendeur, le manager à affûter son esprit d’analyse pour bien percevoir, identifier, comprendre les signaux plus ou moins faibles que son boss, son assistante, ses collaborateurs, ses clients, ses prospects …lui envoient. Puis à partir de cet état des lieux, raisonner en objectifs et construire le plan d’actions pertinent qui permettra de les atteindre. Et jouer un plan d’action, ce n’est rien d’autre que d’appliquer des techniques ou mettre en place des process, qui eux aussi peuvent être présentés, testés lors d’une formation puis ensuite appris par les participants après la formation. Car pour intégrer, il faut investir du temps. La formation ne suffit pas.

    Mais quelle formation permettra d’installer le logiciel de la positivité, de l’enthousiasme, de la passion et du sourire ?

    Raisonnons par l’absurde. Par l’absurde, car la situation suivante ne se présente jamais tout à fait dans ces termes. Mais faisons comme si…Si nous devions choisir, de façon binaire… Préférons nous un manager/un vendeur : organisé, pédagogue, valorisant, exigeant, à l’écoute mais… mollasson, pessimiste et manifestant du désintérêt pour le métier de son entreprise, celui de son service et celui de ses clients ?

    Ou préférons-nous un manager/ un vendeur…un peu bordélique, pas très organisé, trop bavard…mais positif, enthousiaste, passionné et souriant ?

    Le PEPS – Positif, Enthousiaste, Passionné et Souriant - se communique, s’infuse, se transmet. Mais toujours avec un coefficient de perte.

    Nos collaborateurs ne seront jamais plus PEPS que leurs managers.

    Nos prospects  ne seront, envers nos offres, jamais plus PEPS que nos vendeurs ! D’où l’adage : « À offre présentée mollement, réponse systématiquement molle. A offre présentée toniquement, réponse peut-être tonique »… Et ça ne marche pas que dans la vente…

    Sans PEPS, le rendement de nos collaborateurs est bien pâlot. Et les signatures de nos clients, bien rares.

    Peu d’entre vous ont connu les K7 audio. Mais certains ont connu les disques laser…Les CD !

    Eh bien, imaginons que nous soyons équipés dans notre salon de la meilleure platine CD du monde. Mais aussi, des meilleures enceintes du…monde. Et enfin, du meilleur disque du…du …du monde. Patrick Juvet * : « Où sont les femmes ? ». Appuyons sur la touche « open » de la platine pour qu’elle ouvre sa bouche et calmons sa faim en insérant dans la béance la galette argentée. Appuyons, cette fois-ci, sur « close », puis sur la touche « lecture ». «  Play » pour les anglophones… Et…que se passe-t-il ? Rien ! Nada ! Nothing ! Que dalle ! Macache ! Walou ! On n’entend RIEN ! Le disque et la platine, c’est votre organisation, vos compétences…Et elles sont indispensables. Mais loin d‘être suffisantes. On n’entend rien, car il manque l’ampli qui permet de créer le son.

    Et vous ? Quelle est la puissance de votre ampli ? 5 watt ? 10 watt ? 100 watt ? 10 000 watt ?

    L’ampli du manager, l’ampli du vendeur, c’est son PEPS.

    Pour ces deux métiers, le PEPS n’est pas une option envisageable. Du président au manager de proximité, du téléprospecteur au commercial grand compte, le prérequis minimum pour réussir dans ces métiers c’est le PEPS, l’énergie communiquée. Dès l’entretien d’embauche, sommes-nous attentifs à oublier momentanément les faits d’armes auto-proclamés par les candidats sur leur CV et qui à leur lecture en font évidemment les oiseaux rares à recruter : « + 50% de CA généré en deux ans » « 150 nouveaux clients en 4 ans » « 0% de turn over de l’équipe en 8 ans et 10% de production en plus chaque année » ? Les oublier pour observer s’ils m’embarquent, s’ils me donnent le sourire, s’ils me laissent penser qu’un avenir sympa est possible avec eux, si dans leurs regards la vie est dansante, si après une heure d’entretien j’ai le sentiment de n’avoir passé que 20 minutes en leur compagnie…Et surtout…si j’ai envie de les revoir pour co-construire avec eux une réalité plus belle que celle d’aujourd’hui ?

    Un managé qui n’aime pas voir son manager, qui le fuit…Que dit-il en fait ? Que son manager sent mauvais ? Qu’il n’aime plus son travail et que son manager dans les environs pourrait être synonyme d’augmentation de la charge ? Ou plus certainement que son manager le fatigue… ? Par l’absence de PEPS et la présence de critiques permanentes de ses collaborateurs, de la direction, des autres services, des concurrents, des clients, des taxis, de la programmation des chaînes de télévision, de la circulation sur le périph … Que deviendra un collaborateur managé par un manager sans PEPS ? Dans le meilleur des cas pour lui, l’entreprise et les clients : un démissionnaire. Dans le pire des cas, et avant tout pour LUI, un collaborateur qui peu à peu s’éteindra et dont les rendements, l’envie de servir seront le reflet exact de l’obscurité dans les yeux de son manager.

    Un client qui préfère depuis un an échanger par mail plutôt qu’accorder du temps à son vendeur…Pour de vrai ? Que dit-il ? Qu’il est vraiment surbooké ? En permanence ? Ou que le vendeur lui apporte aujourd’hui juste une solution à un manque…mais sans PEPS. Que se passera-t-il lorsqu’inévitablement, ce client rencontrera un vendeur d’une société concurrente, avec une offre sensiblement identique, peut-être un peu plus chère mais portée par ce vendeur PEPS ? Jour de générosité, nous vous donnons la réponse : le client changera de crèmerie !

     Et si l’entreprise n’est pas pétrie de certitudes concernant le PEPS comme condition sine qua non, non suffisante mais nécessaire pour donner l’énergie aux collaborateurs de s’investir et aux prospects de commander, le départ d’un client sera analysé comme un manque de loyauté de celui-ci envers l’entreprise, ou comme une inadaptation de notre offre au marché. Avec le risque de réagir à côté : on refait la plaquette de l’entreprise, on retouche au packaging des produits…

 

Et vous, qu’en pensez-vous ?

Bonnes réflexions.

 

* Nous pouvons tolérer aussi : Claude Barzotti et « Madame », Les Forbans et « Chante » et F.R. David et « Words ». Et puis c’est tout !