Une bonne claque et ça repart !

Thibault se promène.
   
    Subitement, il sent le sol se dérober sous ses pieds. Il perd connaissance. Dans son malheur, Thibault a une part de chance : un médecin arrive. Rapidement, il diagnostique un simple évanouissement. Rien d’étonnant : il fait si chaud depuis quelques jours et les organismes sont épuisés. Le médecin fait asseoir Thibault. Il le tient fermement et s’adresse à lui en lui parlant à voix forte et en le secouant gentiment. Thibault ouvre les yeux, étonné de ce qu’il est en train de vivre. Aucun souvenir de son malaise. Le médecin interroge Thibault. Ce matin, il est parti rapidement de chez lui, sans prendre de petit déjeuner. Un peu de manque de sommeil et cette canicule éprouvante, son organisme est malmené. Le médecin conseille à Thibault de rester assis sur un banc à l’ombre, le temps qu’il aille chercher un remontant. Ce sera un pain au chocolat. Thibault est requinqué. Il repart…
 
Quinze jours plus tard…Thibault se promène…
 
    Brutalement, il perd connaissance. Son ange gardien est encore là. Le diagnostic est rapide : une syncope. Beaucoup plus sérieux qu’un évanouissement. La vie de Thibault n’est pas en danger mais il ne faudrait pas que cet état de malaise se prolonge. Pour le ranimer, le médecin n’hésite pas. Une bonne claque…une deuxième…et enfin une troisième. Ça repart ! Thibault ouvre les yeux et reprend enfin contact avec la réalité. Cette fois, le médecin ne peut pas se contenter d’un pain au chocolat. Il appelle les pompiers. Un examen clinique plus poussé s‘impose. Après quelques heures passées dans un box aux urgences, Thibault est autorisé à rentrer chez lui avec ordre de se reposer trois jours.
 
 
Un mois plus tard…Thibault se promène…
 
    Une vive douleur dans le bras gauche. Il s’effondre brutalement. Le bon médecin est là, équipé d’un défibrillateur. L’évidence s’impose, Thibault est victime d’une crise cardiaque. Le médecin doit agir vite et prend tous les risques. Trois minutes pour agir, c’est peu. Ne rien faire, c’est condamner Thibault à une mort certaine. Utiliser le défibrillateur c’est prendre le risque de provoquer le décès. Les décharges qui seront envoyées peuvent provoquer un arrêt cardiaque définitif au lieu de faire repartir le cœur. Mais si la défibrillation est bien maîtrisée, le cœur peut repartir. Une seule certitude, le cœur ne battra plus si on ne l’aide pas à redémarrer. Notre médecin est un expert en réanimation cardiaque. Trente ans qu’il pratique. Les gestes sont précis, son visage impassible. Mais ses émotions, sa peur de voir la vie foutre le camp et l’espoir que le cœur refonctionne cohabitent toujours aussi intensément durant ces minutes hors du temps.
 
    Le cœur est reparti. Thibault revient de loin. Il est resté de longues secondes en équilibre précaire entre la vie et la mort. Il s’en est fallu de peu pour que Thibault bascule du mauvais côté. Merci au médecin. Mais le médecin ne pouvait pas tout… Encore fallait-il que Thibault veuille lui aussi vivre. Manifestement, c’était le cas.
 
   Etonnant quand même ! Plus la vie s’éloigne rapidement, plus la solution pour ramener le malade dans la vie est énergique et ferme !
 
    Ne serait-ce pas la même chose dans la vie professionnelle, lorsqu’un collaborateur se met en position de hors-jeu ?
    Un retard isolé dans l’année…comparable à un simple évanouissement, ne nécessitera qu’un entretien rapide et ferme.
    Un retard et le non-respect du port des EPI (équipements de protection individuelle) dans la même semaine, nécessiteront un entretien toujours rapide mais beaucoup plus viril. Viril, pas agressif ni irrespectueux.
    Un retard, le non-respect du port des EPI et la dissimulation d’une erreur nécessiteront un entretien électrochoc… Avec le risque de précipiter le contrat de travail dans l’abîme.
    Si le manager décide de rencontrer son collaborateur hors-jeu, un peu baron sur les bords, souvent récidiviste, parfois multirécidiviste, ce n’est pas pour le précipiter dans l’abîme mais bien pour le faire revenir dans la Vie. Pour cela, il faut que le manager le veuille mais le collaborateur aussi.
 
    Mais si le manager ne le veut pas, assure-t-il toujours sa mission ? Est-il encore manager, celui qui regarde son collaborateur peu à peu s’éloigner du cadre d’exigence non négociable, alors que son respect est une des conditions indispensables qui légitime sa présence ?
Ou est-il pris en flagrant délit de non-assistance à collaborateur en danger pouvant entraîner la mort de la collaboration ? Quand bien même, par ses comportements, le collaborateur provoque les situations de danger.
    A moins que le manager ne soit dépourvu de techniques face à ce type de situation. Utiliser un défibrillateur ne s’improvise pas, quoi qu’en disent les affichages simplistes sur les lieux publics. Gérer des entretiens de recadrage, non plus. Un manager démuni de ce savoir-faire ne pourra pas manager durablement, car le hors-jeu est inévitable. En effet, les motivations conscientes ou pas d’un managé pour se mettre en situation de hors-jeu sont nombreuses : valider l’importance de l’exigence, tester le courage du manager, se faire remarquer pour attirer l’attention ou chercher la rupture.   
Sans ces compétences managériales, le manager n’aura pas d’autre choix que de détourner le regard et de laisser faire, et sa crédibilité  s’évaporera.
 
 Et un manager sans crédibilité n’est plus un manager !
 
 Et vous, qu’en pensez-vous ?
 
 Bonnes réflexions.